Lieu perdu, lieu maudit, lieu hanté, lieu de curiosité. Tous ces adjectifs que les habitants employaient pour ce bâtiment chargé d'histoires. Et il a sans doute été témoin d'énormément de faits. Tous aussi inquiétants que les autres. C'était l'endroit idéal pour aller revendre une arme ou deux. C'était aussi parfait pour s'échanger un peu de drogue contre des billets verts. Certes, il était fréquenté plus que de raison, mais les chambres étaient encore nombreuses à être accessibles. T'avais entendu parler de la vieille ville découverte il y a peu. Tout le monde en avait entendu parler. T'avais aussi pris connaissance de l'existence de l'asile. Cet endroit censé foutre la chaire de poule, qu'il y abrite encore du monde ou non. Et pourtant, toi, ça te fascinait. Il faut dire que tu n'étais pas comme tout le monde. T'as du subir des tests à n'en plus finir. C'était difficile de montrer à tous que tu n'avais aucun problème et que tu ne portait pas sur ton front l'étiquette claire et précise d'une femme avec un trouble du comportement ou tout autre problème impliquant ta personnalité. Parfois, tu te laissais à penser que tu aurais pu avoir droit à un lieux de vie semblable à celui dans lequel tu tentais de te repérer à l'instant. Tu t'étais aventuré dans l'aile ouest où l'on pouvait clairement apercevoir les ravages d'un incendie. Les murs et le sol étaient complètement noirs. Par endroit, le plafond s'affaissait. Tu t'es décidée à entrer dans une des chambres où, semblait-il, tu n'y avais aperçu aucun individus. Tu avais prévu de rencontrer un client pour lui refourguer un pistolet. Tu attendrais ici qu'il se pointe. Mais voilà que tu te retournes et que tu aperçois une ombre dans un coin de la pièce exiguë. Noah. Sérieux, tu m'as fait peur ! Soulagement. Un petit souffle réussit à passer entre tes lèvres. L'endroit était mal choisi pour régler vos comptes. Vous vous étiez répartis les endroits de la ville pour ne pas vous marcher sur les pieds. Celui-ci manquait à l'appel. On ne s'est pas encore mis d'accord, je sais, mais ne t'en fais pas, aujourd'hui, je deale pas. Tu lui montres alors l'objet de ta venue sans pour autant le pointer directement vers lui. L'endroit craquait de toute part. Les bruits te surprenaient de plus en plus. C'était pas sûr, ici. Les flics pouvaient débouler à tous moments. Tout comme un morceau de toiture pouvait t'emporter directement vers l'autre monde. Fallait pas venir ici à la légère. Mais au moins, t'avais une lampe torche vieille de quelques années pour te rassurer, que t'avais sorti d'un tiroir lorsque l'électricité a été coupée de force. Et puis, tu avais aussi un flingue ... Non chargé. Ça dissuaderait quand même les éventuels p'tits cons qui te chercheraient des ennuis.

Voilà qu'en fait, vous vous êtes fait peur mutuellement. Noah avait sans doute autant flippé que toi. Et le voilà qui flippait encore plus à la vue du flingue que tu lui présentais. Okay, tu comprenais cette réaction. Avant que Duke ne t'explique les choses, tu en avais peur aussi. Une fois qu'on sait y faire, il n'y a plus de quoi paniquer comme une meuf et se pisser dessus. Noah, tu me prends pour qui ? Tu croyais vraiment que j'allais me balader et vendre un truc chargé ? J'vends pas des armes pour me faire tuer dans la foulée ! Tu pratiques ensuite quelques manipulations pour bien lui montrer que le chargeur est vide et que la chambre du canon ne contenait aucune balle. De toute manière, il fallait être suicidaire pour donner à quelqu'un une arme directement chargée. Si la personne voulait des munitions, elle les avait, mais pas dans ses flingues.

Noah venait de se prendre un lapin. Et il faisait comprendre son mécontentement avec un soupir profond. Toi aussi, finalement tu t'étais pris un lapin. On est deux, je crois ... Tu soupire aussi et tu finis par ranger l'arme où elle était initialement. Et le voilà qui te demande comment sortir d'ici. Pas de problème, tu l'aiderais à retrouver la sortie. Mais, au fait, tu étais venue par où, déjà ? Ecoutes, mec ... J'sais plus par où j'suis entrée dans ce trou à rats. Tu analyse un temps le couloir. Étais-tu venue par la gauche ou par la droite ? Aucune idée. Tu finis alors par te retourner vers ton interlocuteur. On va continuer à marcher dans ... Cet endroit. On trouvera bien une sortie, sans doute. Tu le regardes un instant et tu entames la marche, pointant le faisceau lumineux de ta lampe-torche vers tous les petits bruits que tu croyais entendre. Sinon, quitte à rester coincés ici, on peut toujours se poser dans un coin et se partager ce que tu venais vendre. Tu lâches un petit rire. Tu l'avais fait un nombre incalculable de fois. Il t'es déjà arrivé de rester coincée dans un ascenseur et d'en profiter pour te fumer un joint ou deux avec tes deux acolytes. Après tout, ton immeuble n'était plus de première fraîcheur. L'ascenseur tombait souvent en panne.